Les stratégies de gestion des coûts de construction en Suisse

L'évolution explosive des coûts de construction : 2019-2024

Les années 2022 à 2024 ont marqué un tournant dans l’évolution des coûts de construction en Suisse. Après une période de croissance relativement stable, les prix ont connu une hausse vertigineuse depuis 2022, entraînant des défis sans précédent pour les acteurs du secteur.

Les principaux facteurs à l’origine de cette inflation sont multiples :

  • La pandémie de Covid-19 : Les perturbations des chaînes d’approvisionnement mondiales, les fermetures d’usines et les restrictions de transport ont créé des pénuries de matériaux, faisant grimper les prix.
  • La guerre en Ukraine : Le conflit a exacerbé les tensions sur les marchés de l’énergie et des matières premières, impactant directement les coûts de construction.
  • La demande soutenue : La reprise économique post-pandémique a stimulé la demande en matière de construction, exerçant une pression supplémentaire sur les prix.
  • La pénurie de main-d’œuvre : Le manque de travailleurs qualifiés dans le secteur a entraîné une hausse des coûts de la main-d’œuvre, alourdissant les budgets de construction.
  • L’inflation généralisée : Le contexte inflationniste général a impacté l’ensemble des coûts de production, y compris ceux liés à la construction.

 

Les stratégies de gestion des coûts de construction en 2023-2024

Face à cette situation complexe, les entreprises de construction doivent adopter des stratégies innovantes pour maîtriser leurs coûts :

1. Optimisation de la conception :

La Construction virtuelle : Ces nouvelles technologies axées sur la conception virtuelle et la visualisation, notamment le BIM (Modélisation des Informations sur les Bâtiments) et les logiciels de gestion de la construction permettent de créer des environnements virtuels pour imaginer et représenter des structures avant leur édification, réduisant ainsi les coûts liés aux erreurs de construction.

La Modularisation : Préfabriquer des éléments de construction en usine permet de gagner en efficacité et de réduire les coûts de main-d’œuvre sur site. Ex. La solution Modules pour salle de bains “Monobath” de Porcelanosa propose des systèmes en applique et des salles de bains préfabriquées sur mesure qui offrent de nombreux avantages par rapport à la réalisation traditionnelle ; ce procédé ayant toutefois un intérêt certain à partir d’un certain nombre de lots.

L’Utilisation de matériaux biosourcés : Ces matériaux, souvent plus locaux et moins énergivores, offrent une alternative intéressante aux matériaux traditionnels : 

– La paille de blé, de froment ou de seigle est directement récoltée dans les champs et transformée en matériau utile à la construction. C’est non seulement un excellent isolant thermique et acoustique, mais également un matériau perspirant qui régule l’humidité.

Sa production locale requiert peu de transport, et elle ne nécessite pas de traitements chimiques.

– L’herbe, utilisée en panneau d’isolation semi-flexible, jouit d’une empreinte carbone négative (1kg produit, 1.5kg de CO2 absorbés). Efficace contre le chaud, le froid, excellent absorbeur phonique, c’est parce-que ses propriétés sont exceptionnelles, que ce matériau est utilisé depuis plus de 10 ans en Suisse.

– Le lin peut être utilisé pour l’isolation thermique et phonique des bâtiments. Incorporé dans les panneaux préfabriqués en bétonil remplace les fibres métalliques ou de verre traditionnellement utilisées avec le béton. Il procure également une excellente aptitude à réguler l’humidité.

Multitâches, le lin est également utilisé sous forme de laine pour l’isolation thermique, de sous-couche pour parquet car c’est aussi un très bon isolant acoustique, de panneaux agglomérés coupe-feu et pare-flamme associée à des fibres de bois. 

– La laine de mouton offre à la fois une isolation thermique et acoustique de qualité. Matériau naturel, renouvelable et biodégradable, son impact environnemental est minimal, son coût est abordable et sa longévité remarquable. En suisse, sont notamment produites des briques garnies de laine de mouton, une première mondiale en maçonnerie isolante.

– Le béton de chanvre, mélange de chaux et de fibres de chanvre, est utilisé pour créer des murs porteurs ou des isolations intérieures et extérieures. C’est un matériau léger, résistant et naturellement antifongique. Les plaques de béton chanvré peuvent également être utilisées entre deux plaques de Fermacelle pour limiter la propagation du feu en cas d’incendie. La culture du chanvre nécessite peu d’eau, régénère les sols et absorbe une quantité importante de CO2, contribuant ainsi à réduire l’empreinte carbone des bâtiments.

– Le bois, l’un des matériaux biosourcés les plus utilisés. Polyvalent, il est utilisé dans la construction pour les charpentes, les murs, les planchers et les revêtements extérieurs. Sa capacité à stocker le carbone tout au long de sa vie contribue activement à réduire l’empreinte carbone des bâtiments. Il procure d’excellentes performances en isolation thermique et acoustique, tout en créant des espaces chaleureux et sains.

– La terre, utilisée dans la construction sous forme de pisé, de torchis ou de briques de terre crue, offre une excellente isolation thermique et régule l’humidité intérieure. Abondante, et recyclable, son utilisation ne nécessite que très peu d’énergie, ce qui réduit considérablement l’empreinte carbone des bâtiments.

– La chaux est utilisée pour la réalisation d’enduits, de mortiers et de badigeons, offrant des propriétés respirantes et régulatrices d’humidité. Sa production émet moins de CO2 que le ciment traditionnel et son application permet de réaliser des constructions durables et écologiques. Elle a des propriétés antifongiques et antiseptiques qui contribuent à un habitat sain.

– Le liège est utilisé principalement sous forme de panneaux ou de granulés comme isolant thermique et acoustique. La récolte du liège n’endommage pas les arbres et sa capacité à stocker le CO2 contribue à réduire l’empreinte carbone des constructions. Sa légèreté, sa résistance à l’humidité et ses propriétés ignifuges en font un matériau de choix pour des bâtiments durables.

– Le bio-ciment : Développé par le Laboratoire de mécanique des sols (LMS) de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), c’est un ciment bactérien fabriqué à base d’urée (molécule de synthèse hautement soluble et non toxique), de bactéries naturellement présentes dans le sol et de calcium. Cette nouvelle biotechnologie a pour vocation de lutter contre l’érosion des sols et les instabilités de terrain, et de faire évoluer le secteur de la construction.

La Conception paramétrique : Cette approche permet de gérer les coûts de construction en optimisant les quantités de matériaux et en réduisant les déchets.

Pays pauvre en matières premières, la Suisse tend à appliquer les principes de l’économie circulaire depuis des décennies. Chaque année, par exemple, environ 12 millions de tonnes (t.) de matériaux d’excavation et de percement et près de 3,2 millions de t de déchets urbains collectés qui sont recyclés. Néanmoins, la situation est très différente selon les catégories de déchets. Les déchets de chantier (qui constituent la principale catégorie en volume), sont ainsi déjà recyclés aux trois quarts, tandis que les biodéchets n’affichent qu’un taux de valorisation de 26 % en 2023  (source : Déchets – gestion, planification, prévention et mesure). 

2. Gestion intelligente des achats :

Les Achats groupés en association avec d’autres entreprises, augmentent le pouvoir de négociation qui permet de bénéficier de meilleures conditions d’achat.

Développer des relations à long terme avec les fournisseurs permet d’instaurer des partenariats solides basés sur une confiance mutuelle et de sécuriser les approvisionnements tout en négociant des prix plus avantageux.

Autre option, l’utilisation de plateformes numériques facilite la recherche de nouvelles filières d’approvisionnement à des prix compétitifs. Elles facilitent la comparaison des prix et l’optimisation des commandes en faisant jouer la concurrence.

 

3. Optimisation de la logistique

Planification rigoureuse des livraisons : Une organisation millimétrée permet de réduire les coûts de transport et de stockage, part significative dans les coûts de construction. L’utilisation de progiciels de gestion de projet simplifie le suivi en temps réel de l’avancement des travaux et l’identification de frottements pour anticiper d’éventuels problèmes.

 

4. Maîtrise des coûts de la main d'œuvre

D’une part par la formation des employés : Une main-d’œuvre qualifiée est plus productive et réduit les risques de reprise de travaux.

D’autre part, l’utilisation de technologies numériques va permettre d’automatiser certaines tâches et d’améliorer la productivité. Par exemple, les systèmes de surveillance basés sur l’IA permettent d’ores et déjà d’accroître la sécurité sur les chantiers et de réduire la fréquence des accidents du travail, en assurant une surveillance permanente et en détectant le plus tôt possible les dangers potentiels.

Selon une étude de la Société Suisse des Entrepreneurs (SSE) réalisée en 2023, il va manquer environ 5600 travailleurs qualifiés d’ici 2040 dans le secteur de la construction. L’utilisation optimisée de la main-d’œuvre et l’implémentation des nouvelles technologies dans les entreprises sera donc inévitable. Aujourd’hui déjà, l’intelligence artificielle (IA) assume des tâches pour lesquelles les capacités humaines font défaut et contribue ainsi à combler le manque de main-d’œuvre qualifiée. Les robots vont automatiser les processus répétitifs et remplacer les tâches qui requièrent une importante force de travail comme le chargement, la peinture ou la maçonnerie. Et dans le futur, nous pouvons espérer voir des engins lourds pilotés par IA, des véhicules terrestres et aériens sans pilote ou des robots collaboratifs capables d’optimiser eux-mêmes les process de travail et d’accroître un peu plus la sécurité sur les chantiers.

 

Quid des perspectives d’avenir pour les coûts de construction ?

Si la situation semble se stabiliser en 2024, il est probable que les coûts de construction restent élevés dans les années à venir. Les entreprises de construction qui sauront s’adapter à ce contexte mouvant seront celles qui réussiront à se démarquer. Au sein du Groupe Orion, nous travaillons constamment à la mise en œuvre de stratégies de gestion des coûts efficaces avec pour ambition de continuer à vous proposer le meilleur rapport qualité/prix. 

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(source image : OFEV, division Déchets et matières premières)