Les infrastructures suisses face au changement climatique

Les infrastructures suisses face au changement climatique : relever les défis d'un avenir incertain

La Suisse, avec ses paysages variés et ses infrastructures complexes, est particulièrement exposée aux conséquences du changement climatique. Une augmentation marquée des températures, la fonte des glaciers, des précipitations extrêmes et les aléas naturels qui leurs sont associés nuisent déjà aux écosystèmes, à la santé et aux moyens de subsistance.  Ces changements ont un impact direct sur nos infrastructures, qu’il s’agisse des transports, de l’énergie, de l’eau ou du bâti. Comment la Suisse s’adapte-t-elle à ces nouveaux défis ? Quels sont les enjeux et les solutions envisagées ?

1. Un pays alpin particulièrement vulnérable

La Suisse, avec ses montagnes, ses lacs et ses rivières, est un pays riche en ressources naturelles. Cependant, ces mêmes ressources sont aujourd’hui menacées par le changement climatique.

  • La fonte des glaciers : Les glaciers alpins reculent à un rythme alarmant. Cette fonte entraîne une diminution des réserves en eau, une modification du régime hydrologique des cours d’eau et une augmentation des risques naturels comme les glissements de terrain et les chutes de pierres.
  • Les événements météorologiques extrêmes : Les épisodes de fortes précipitations, de sécheresses prolongées et de vagues de chaleur se multiplient. Ces événements ont des conséquences directes sur les infrastructures, notamment les réseaux de transport, les systèmes d’assainissement et les bâtiments.
  • L’élévation du niveau de température des lacs : Le réchauffement climatique pourrait modifier significativement la température de l’eau, la couverture de glace et le brassage de nombreux lacs suisses, en particulier les lacs de moyenne altitude. Ce changement aurait des conséquences dramatiques sur le fonctionnement des écosystèmes lacustres.
Changement climatique sur un glacier suisse

2. Les infrastructures suisses sous pression

Face à ces défis, nos infrastructures sont mises à rude épreuve. Par exemple, la recrudescence des mouvements de terrain affecte la sécurité des zones urbanisées, des équipements touristiques, des barrages, des infrastructures routières et ferroviaires, des conduites de gaz et des lignes électriques dans les Alpes. Mais plus généralement, 4 grands types d’infrastructures sont impactés : 

  • Les transports: Le réseau ferroviaire est particulièrement vulnérable aux événements météorologiques extrêmes, notamment les glissements de terrain et les inondations. Les routes et les tunnels sont également touchés par les conséquences du changement climatique.
  • L’énergie: La production d’hydroélectricité, qui représente une part importante de la production énergétique suisse, est directement liée au régime hydrologique. La diminution des débits d’eau et la modification des saisons hydrologiques ont un impact sur la production d’électricité.
  • L’eau: La gestion de l’eau devient de plus en plus complexe. Les sécheresses prolongées mettent à mal les réserves en eau, tandis que les fortes précipitations peuvent provoquer des inondations.
  • Le bâti: Le patrimoine bâti, notamment les bâtiments historiques, est vulnérable aux effets du changement climatique, tels que les hausses de température, l’humidité et les événements extrêmes.
 
 

3. Des solutions pour un avenir résilient

Pour faire face à ces défis, la Suisse met en œuvre diverses stratégies :

  • Adaptation des infrastructures : Renforcement des protections contre les crues, adaptation des systèmes de drainage, renforcement des bâtiments, etc.
  • Développement de nouvelles technologies : Développement de systèmes de prévision des risques naturels, utilisation de matériaux de construction plus durables, etc.
  • Planification à long terme : Intégration des enjeux climatiques dans les plans de développement des infrastructures.
  • Collaboration entre acteurs : Renforcement de la coopération entre les différents acteurs impliqués (autorités, entreprises, chercheurs, etc.).

Ces solutions sont explorées et évaluées dans le cadre de différents programmes en Suisse:

  • Le projet Swiss Climate Change Scenarios a pour objectif de fournir des projections climatiques détaillées à l’échelle régionale pour aider les acteurs à prendre des décisions adaptées.
  • Le programme Résilience des infrastructures critiques vise à améliorer la résilience des infrastructures critiques, telles que les réseaux d’énergie et de communication, face aux événements extrêmes.
  • Les mesures d’adaptation mises en œuvre par les communes : De nombreuses communes suisses ont mis en place des plans d’adaptation au changement climatique, intégrant des mesures pour protéger leurs infrastructures et leurs habitants.

Les défis à relever

La Suisse est confrontée à un défi de taille : adapter ses infrastructures à un climat en évolution rapide. Les enjeux sont importants, tant sur le plan économique que social et environnemental. Si notre pays a déjà mis en place des mesures pour s’adapter au changement climatique, de nombreux défis restent à relever :

  • Le financement des mesures d’adaptation : Les coûts liés à l’adaptation des infrastructures sont élevés. Il est nécessaire de trouver des financements durables pour mettre en œuvre ces mesures.
  • La coordination entre les différents niveaux de décision : La coordination entre les autorités fédérales, cantonales et communales est essentielle pour une mise en œuvre efficace des mesures d’adaptation. Dans le domaine de l’énergie, par exemple, les cantons ont un rôle essentiel à jouer en matière d’adaptation. Ils sont responsables des prescriptions dans le domaine des bâtiments, lequel a été répertorié comme l’un des principaux champs d’action de l’adaptation au changement climatique.
  • La prise en compte des incertitudes : Le changement climatique est un phénomène complexe et les projections futures sont parfois incertaines. Cela requiert de développer des stratégies d’adaptation flexibles et capables de s’adapter à l’évolution de la situation.

 

4. Le secteur du bâtiment s'adapte

Les fortes variations de températures entraînent une utilisation accrue des installations et appareils de chauffage et de refroidissement. Cette évolution va à l’encontre des objectifs de la politique énergétique et climatique. Il a été démontré qu’il est tout à fait possible de maintenir des conditions d’habitat et de travail agréables sans apport notable d’énergie, par l’application de mesures de construction et d’exploitation adaptées. Des prescriptions en matière de construction, de technique et d’exploitation doivent prévenir la surchauffe ou la perte d’énergie des bâtiments, et permettre ainsi de conserver une température ambiante optimale. 

À titre d’illustration, voici quelques déclinaisons de mesures liées aux bâtiments : 

  • Conception de bâtiments selon les standards Minergie pour les nouvelles constructions ou la rénovation des bâtiments existants. 
  • Installation de systèmes permettant d’évacuer pendant la nuit la chaleur piégée à l’intérieur des bâtiments (moyens de refroidissement nocturne, par exemple, fenêtres à ouverture automatique). 
  • Amélioration de l’isolation des bâtiments. 
  • Protection solaire des bâtiments et des surfaces vitrées. 
  • Végétalisation des bâtiments. 
  • Augmentation de la proportion de rayonnement réfléchi par un choix approprié de couleurs et de matériaux de construction des bâtiments.
  • Mise en place de systèmes de régulation dynamique du chauffage des bâtiments.
  • Utilisation d’équipements plus efficaces, économes en énergie et dégageant peu de chaleur. 
  • Généralisation des ampoules LED. 
  • Modernisation des systèmes de ventilation.

 

En amont de ces équipements, les nouveaux matériaux de construction jouent un rôle clé dans la réduction des émissions de carbone et la protection contre les phénomènes climatiques extrêmes : 

Le béton bas carbone : De nombreuses entreprises suisses développent des bétons bas carbone, notamment à base de ciment alternatif et de matériaux recyclés. Le béton décarboné permet de réduire significativement l’empreinte carbone des projets de construction tout en offrant une résistance accrue face aux températures extrêmes et à l’humidité.

Le bois lamellé-croisé (CLT) : Le bois, en particulier le bois lamellé-croisé, est un excellent matériau pour les constructions durables. Il capte le carbone pendant sa croissance et présente une forte résistance thermique, ce qui le rend approprié pour les bâtiments conçus pour résister aux variations climatiques.

 

La gestion des eaux constitue également un enjeu majeur. Les infrastructures suisses doivent s’adapter à des prélèvements plus fréquents et plus intenses, ainsi qu’à des périodes de sécheresse prolongées. Les solutions de gestion des eaux pluviales permettent de minimiser les risques d’inondation et de garantir un approvisionnement en eau durable.

Développement des toits végétalisés : En Suisse, l’utilisation de toits verts est de plus en plus populaire. Ils permettent d’absorber les eaux pluviales, entraînant ainsi les risques de surcharge des systèmes d’évacuation. De plus, ils améliorent l’isolation thermique et réduisent l’effet d’îlot de chaleur urbain.

Les pavés perméables permettent à l’eau de s’infiltrer directement dans le sol, notamment le ruissellement et limitent les inondations lors des pluies torrentielles. Ils sont particulièrement efficaces dans les zones urbaines à forte densité.

 

Enfin, les technologies numériques jouent un rôle essentiel dans l’optimisation et la surveillance des infrastructures en temps réel, permettant une meilleure gestion des ressources et une réponse rapide aux crises climatiques.

Systèmes de gestion intelligente : L’Internet des Objets (IoT) permet de surveiller les infrastructures en temps réel. Que ce soit pour la gestion des ponts, des routes ou des réseaux d’eau, les capteurs connectés fournissent des données et alertes à anticiper et réagissent rapidement aux dégradations ou aux risques liés au climat (effondrements, inondations, etc.).

Jumeaux numériques : Cette technologie permet de créer des répliques numériques des infrastructures physiques, afin de tester différents scénarios climatiques extrêmes et d’optimiser les plans de réponse.

En investissant dans ces solutions durables et en accentuant la coopération entre les différents acteurs, la Suisse peut ainsi intensifier sa résilience face aux impacts du changement climatique et construire un avenir prospère pour les générations futures.